Attention: bien que certaines informations puissent être encore d'actualité dans un an, d'autres renseignements pourraient n'être plus à jour dans 3 mois. Si vous avez le moindre doute, n'hésitez pas à nous interroger.

Diabète

Question
Bonjour,

Le patient suffisant pancréatique ont-ils eux aussi des risques accrus de diabète ?

Si oui une prévention par une alimentation saine peut-être elle vraiment efficace ou bien la cause est purement génétique et on ne peux rien y faire ?

Merci
Réponse
Bonjour,
Il convient d’abord de préciser qu’il existe plusieurs types de diabète. Cf. le lien : www.afd.asso.fr/diabete

Le diabète de type 1 Diabète insulino-DEPENDANT - DID : il concerne 10% des diabétiques, survient habituellement chez des enfants, adolescents ou adultes jeunes et s’exprime par des symptômes nets qui permettent très rapidement le diagnostic : une soif intense, des urines abondantes et un amaigrissement rapide voire un coma acido-cétosique. C’est une maladie auto-immune, les cellules Bêta du Pancréas étant détruites par des auto-anticorps. Il existe également des facteurs environnementaux mal connus et des facteurs de prédisposition génétique (on retrouve des antécédents chez un des parents dans 5 % des cas). Le corps ne fabriquant plus d’insuline, l’unique traitement actuellement est l’apport d’insuline.
Le diabète de type 2, Diabète insulino-RESISTANT : il représente 85% des diabétiques, apparaît généralement chez le sujet de plus de 40 ans mais de plus en plus souvent actuellement chez des adolescents et adultes jeunes. Les facteurs favorisants sont essentiellement génétiques (le risque de transmission à un enfant est de 40% lorsqu’un des parents est diabétique de type 2 et de 70% lorsque les deux parents le sont). Le surpoids, l’obésité et le manque d’activité physique sont la cause révélatrice de ce diabète chez les sujets génétiquement prédisposés. Evoluant de manière sournoise, il passe longtemps inaperçu (il s’écoule en moyenne 5 à 10 ans entre l’apparition des premières hyperglycémies et le diagnostic) et est souvent diagnostiqué à l’occasion d’une complication notamment d’un accident vasculaire. C’est direl’importance de sa prévention. Deux facteurs sont responsables de l’hyperglycémie dans le diabète de type 2 : soit le pancréas fabrique toujours de l’insuline mais pas assez (Insulinopénie), soit l’insuline agit mal (Insulinorésistance). En conséquence, il est traité par des mesures hygiéno-diététiques puis rapidement par des traitements antidiabétiques par voie orale (ou par injection notamment la carence en insuline devient trop importante). Leur efficacité n’est optimale que si ces traitements sont associés à une alimentation équilibrée et une activité physique régulière+++.
Le diabète de la mucoviscidose est tout à fait particulier. Il fait partie des 5% d’autres formes de diabète. Le rapport 2014 du Registre Français de la Mucoviscidose enregistre des données de 6356 patients dont 1154 (18.2%) ont un diabète traité ou non par insuline et dont 222 (6.6%) sont traités par insuline. Rançon du progrès de la prise en charge, la fréquence de ce diabète augmente avec l’augmentation de la durée de vie des patients : parmi les 3334 patients de moins de 20 ans, 192 (5.8%) ont un diabète traité ou non par insuline dont 42 (1.3%) traités par insuline alors que parmi les 3022 patients de 20 ans ou plus, 962 (31.8%) ont un diabète traité ou non par insuline dont 180 (5.9%) traités par insuline. Le diabète des patients atteints de mucoviscidose est secondaire à une destruction plus ou moins importantes des cellules Bêta mais également Alpha pancréatiques qui sécrètent respectivement l’insuline et le glucagon. Cette destruction est secondaire à la fibrose pancréatique qui se développe progressivement autour des dilatations kystiques du pancréas liées à l’obturation des canaux pancréatiques par le mucus épaissi et visqueux. Il est d’autre part possible que la protéine CFTR synthétisée par le gène muté de la mucoviscidose altère le mécanisme de sécrétion d’insuline. Nous n’avons pas connaissance à ce jour que d’autres facteurs génétiques puissent entrer en ligne de compte.

Il était généralement admis que les patients suffisants pancréatiques (15% des patients) n’étaient pas à risque de développer un diabète car du fait d’une forme habituellement plus modérée de la maladie l’encombrement des canaux et la fibrose du pancréas étaient moins importants et n’altéraient par la sécrétion d’insuline par les cellules Bêta. Des travaux plus récents remettent cependant en question cette idée. Une étude publiée par une équipe pédiatrique américaine en 2015 dans le Journal of Cystic Fibrosis (cf. référence) apporte des éléments plus précis de réponse à votre question. Elle concernait 146 patients atteints de mucoviscidose dont 139 insuffisants pancréatiques et 7 suffisants pancréatiques. Si les tests d’hyperglycémie provoquée étaient normaux chez les 7 suffisants pancréatiques et anomaux chez 2/3 des insuffisants pancréatiques, un enregistrement semi-continu du glucose et de l’insuline dans le sang lors du test montrait des anomalies (diminution de la sécrétion d’insuline au regard des taux de glucose) chez tous les patients même si elles étaient moins importantes chez les suffisants pancréatiques.

En conclusion, bien que ces résultats mériteraient d’être confirmés par des études concernant un plus grand nombre de patients, il apparaît que le risque d’intolérance glucidique et de diabète lié à la mucoviscidose existe aussi chez les patients suffisants pancréatiques même s’il est nettement moindre que chez les insuffisants pancréatiques.

Les recommandations de bonnes pratiques, notamment pour ce qui concerne l’hygiène de vie (alimentation et activité physiques) et le contrôle annuel de la tolérance glucidique après l’âge de 10 ans, concernent tous les patients qu’ils soient suffisants ou insuffisants pancréatiques. Enfin, le rôle possible de la protéine CFTR mutée dans la perturbation de la sécrétion d’insuline, s’il est confirmé par des études à venir, laisse espérer une possibilité d'effet favorable des nouvelles thérapeutiques modulatrices du CFTR, actuelles et à venir.

Espérant avoir répondu à votre question.

Bien cordialement,
Dr Gilles RAULT, CRCM de Roscoff
13.04.2016
La réponse est proposée par: Dr Gilles Rault
www.afd.asso.fr/diabete


Insulin secretion abnormalities in exocrine pancreatic sufficient cystic fibrosis patients.
Wooldridge JL et al.
J Cyst Fibros, 2015 Nov;14(6):792-7. doi: 10.1016/j.jcf.2015.02.009. Epub 2015 Mar 6.