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Mucoviscidose et populations

Question
Bonjour,

J'aimerai savoir pourquoi lorsqu'on fait des recherches sur la mucoviscidose il est très fréquemment dit que cette maladie touche en grande majorité les populations caucasiennes (européennes). Hors, je viens moi même d'Afrique subsaharienne et mon mari est originaire du maghreb et notre enfant est atteinte de la mucoviscidose. De même, je vois souvent au CRCM des patients atteints d'origine africaine, maghrébine ou asiatique.

D'où mon grand étonnement à l'annonce du diagnostique de mon bébé car quand on m'a parlé de maladie génétique j'ai tout de suite pensé à la drépanocytose.

Est ce dû au fait que les statistiques ne se basent que sur les patients recensés en Europe et en Amérique du Nord ou y a t-il vraiment une prédisposition génétique pour les caucasiens concernant la mucoviscidose ?

J'espère que ma question ne gênera pas.

Merci.
Réponse
Bonjour,

Votre question est fort pertinente et n’a aucune raison de gêner. La fréquence de la mucoviscidose varie effectivement dans les populations ethniques du globe même si ces fréquences ne sont pas toujours connues précisément.

La persistance au fil des siècles de maladies génétiques autosomiques récessives conduisant le plus souvent à un décès précoce en l’absence de traitement est expliquée, selon une loi de génétique des populations (loi d’Hardy Weinberg), par l’existence de conditions faisant apparaître un avantage sélectif des porteurs sains d’une seule mutation du gène de ces maladies. C’est notamment le cas de la drépanocytose et de la mucoviscidose.

La plus grande fréquence de la drépanocytose dans les populations africaines est ainsi vraisemblablement liée au fait que les porteurs sains d’une mutation de cette maladie résistent mieux au paludisme, maladie particulièrement fréquente et mortelle dans les régions équatoriales, tropicales et subtropicales, notamment en Afrique. Les porteurs sains d’une mutation de la drépanocytose ont donc bénéficié, dans les régions où le paludisme est particulièrement fréquent, d’un avantage sélectif au cours des siècles conduisant à une augmentation de leur proportion dans les régions concernées et de la fréquence des couples à risque de transmettre la maladie.

Si la mucoviscidose est plus fréquente dans les populations caucasiennes originaires d’Europe et notamment dans les populations celtiques, c’est que les porteurs sains d’une mutation du gène de la mucoviscidose ont été confrontés à des conditions faisant apparaître un avantage sélectif. Plusieurs hypothèses ont été avancées dont aucune ne peut être cependant prouvée :
- existence d’une plus grande fécondité des couples de porteurs sains ?
- meilleure survie des porteurs sains lors des grandes épidémies de peste et de choléra qui ont été particulièrement mortelles en Europe ?
- voire, existence d’une plus grande résistance aux intoxications par les métaux lourds (plomb, cuivre…) dont l’utilisation artisanale a été une des particularité des populations celtes ?

Par ailleurs, la fréquence de la mucoviscidose n’est bien connue que dans les pays où elle est diagnostiquée. Elle varie certes suivant les populations mais le brassage des populations qui existe depuis quelques siècles et est en forte augmentation depuis plusieurs décennies tend à atténuer les différences de fréquence. La fréquence de la mucoviscidose est ainsi certainement plus élevée dans les populations afro-américaines ou afro-européennes que dans les populations africaines.

Espérant avoir répondu à votre question
Cordialement,

Dr Gilles RAULT, CRCM de Roscoff
03.11.2016
La réponse est proposée par: Dr Gilles Rault